Photographier, c’est devoir faire des choix. Et je dirais que le tout premier consiste à choisir ce qu’on va intégrer à l’intérieur du cadre, ce qu’on va rejeter et ce qu’on va couper. Aujourd’hui, nous allons voir ensemble comment cadrer vos éléments, quelle échelle de prise de vue choisir et les petites erreurs à ne pas commettre.
Échelle de prise de vue
L’échelle de prise de vue va déterminer la quantité d’éléments que vous allez introduire dans votre image. Toutes les échelles sont possibles en photo culinaire. C’est à vous de savoir si vous souhaitez montrer votre plat dans son décor, ou au contraire, si vous voulez vous en approcher pour souligner un détail gourmand.
Vue globale
La vue globale, ou plan large, permet de contextualiser votre plat sur la scène. La photo va montrer à la fois la recette et tous les éléments de décor qui se trouvent autour. C’est donc la vue à adopter si vous avec besoin de créer et transmettre une ambiance. Cette vue nécessite une mise en scène soignée et travaillée. Les règles de cadrage et de composition vous seront d’une aide précieuse.
Cadrage serré
En vous rapprochant de votre scène, vous focaliserez l’attention sur votre plat et uniquement votre plat. Le reste de la scène sera peu présente sur la photo. Vous n’aurez pas à accorder trop d’importance à la mise en place des éléments, mais vous devrez porter un soin particulier au stylisme culinaire. C’est un cadrage qui va donner l’envie de goûter votre recette car vous aurez créé une proximité entre lui et le plat.
Gros plan
En vous approchant encore un peu plus, vous donnerez une nouvelle dimension à votre plat. Vous focaliserez l’œil sur la texture de la recette. Par le simple biais du visuel, vous allez faire appel au sens du touché : glacé, mousseux, velouté, moelleux, fondant, croustillant…
Votre appareil photo et votre objectif peuvent mettre une limite à cette proximité. Passée une certaine distance, votre objectif ne pourra plus faire la mise au point et votre photographie sera floue. Si vous possédez un compact, regardez si vous avez la possibilité d’enclencher le mode macro souvent symbolisé par une fleur. Avec un reflex, vous pourrez vous approcher plus facilement si vous utilisez un objectif macro. Pour en savoir, je vous invite à lire mon article sur la macrophotographie.
L’échelle de prise de vue contrôle la taille de vos éléments. C’est en avançant et en reculant de votre scène que vous jaugerez de leur importance dans le cadre. Il s’agit maintenant de l’exploiter pour placer vos plats sans erreur.
Echelle de prise de vue et objectif
Il est un paramètre qui va avoir un impact sur l’échelle de prise de vue : la focale de votre objectif. Exprimée en mm (35 mm, 50 mm, 100 mm), elle correspond à la largeur du champ de vision qu’elle couvre.
Une longue focale (par exemple, 200 mm) présente une vue restreinte de notre environnement. Tandis qu’une focale plus courte (par exemple, 24 mm) couvre un champ beaucoup plus large.
Pour bien comprendre cette notion, voici l’exemple d’un panier de fruits pris avec 2 focales différentes (À gauche, un objectif 60 mm, à droite un objectif 24 mm).
En me plaçant de sorte que le panier prenne la même proportion sur les deux images, vous remarquerez qu’il s’agence différemment avec l’arrière-plan. Avec l’objectif 60 mm, la distance entre le panier et les éléments du fond est réduite, les perspectives sont écrasées et l’impression de profondeur diminue. À l’inverse, avec l’objectif 24 mm, la distance entre les éléments correspond davantage à la réalité, le plateau et les épis de blés prennent une place plus importante en arrière-plan. La différence est encore plus flagrante par la présence des planches. Remarquez comme leurs lignes sont plus fuyantes sur la seconde image.
Autre exemple avec ces 3 images. J’ai laissé en place mon trépied et n’ai fait que changer les objectifs pour que vous puissiez comprendre la différence.
De gauche à droite : Objectif 50 mm, Objectif 85 mm, objectif 100 mm. Voyez comment je me suis rapprochée du plat, sans même m’avancer.
Exploiter son cadre
La façon dont vous allez placer un plat ou la façon dont vous allez le couper doit se faire selon certaines règles. Un cadrage judicieux va permettre de dynamiser vos images et d’y apporter un peu plus d’harmonie.
Cadrage tangent ou « plein cadre »
On parle de cadrage tangent lorsque le sujet est cadré serré sans être coupé. Comme les bords enserrent le plat de chaque côté, il semble emprisonné dans le cadre et semble étouffé. Il vaut mieux éviter ce genre cadrage. Laissez respirer votre plat, reculez un peu pour mettre un peu plus d’espace de chaque côté et le photographier dans son ensemble.
À droite, ce plat à gratin est trop enfermé dans le cadre de la photo. En reculant juste un peu, je laisse un peu plus d’espace à gauche et à droite du plat, mais aussi en bas et en haut ce qui laisse d’ailleurs apparaître quelques éléments supplémentaires.
Coupez avec le cadre !
Si vous souhaitez prendre en photo votre plat de près, alors coupez ! Coupez par 1 bord, par 2 bords, par 3 bords et même par 4 bords. Couper le sujet apporte plus de structure et donne une accroche.
Il n’est pas toujours évident de ne montrer qu’une partie de son sujet, nous voulons spontanément le photographier dans sa totalité pour une image purement descriptive. Mais il n’est pas nécessaire de tout montrer (surtout si vous incluez plusieurs photos sur votre blog), variez les cadrages et les échelles de prises de vue. N’hésitez pas à être sélectif lorsque le sujet s’y prête. Sachez couper franchement pour montrer un choix assumé. Autrement, vous donnerez la mauvaise impression d’un défaut de cadrage.
Quelques exemples de cadrage coupé.
Cadrage coupant le bord gauche.
Cadrage coupant le bord gauche et le bord droit.
Cadrage coupant le bord gauche, le bord droit et le bord haut.
Cadrage en coin
L’un des réflexes que nous avons lorsque nous photographions, c’est de placer le sujet en plein milieu du cadre. Il en résulte une photo statique qui manque d’intérêt. Avec un cadrage en coin, vous allez apporter un réel dynamisme et de la structure. Placez votre plat dans l’un des coins de l’image et coupez-le éventuellement par le cadre, horizontalement et/ou verticalement.
En plaçant votre sujet dans un des coins, pensez à combler le coin opposé par un autre élément pour former une diagonale imaginaire.
Cadrage et direction du sujet
Une scène se compose de formes géométriques définies par la présence de votre plat et des éléments du décor : le cercle d’une assiette, le rectangle d’un cake, le triangle d’une part de gâteau, l’ovale d’une baguette. Certaines de ces formes offrent à notre regard une direction que nous ne soupçonnons pas. C’est ce qu’on appelle “une ligne directrice”. Certains sujets ont tout intérêt à être cadrés judicieusement sans quoi une impression désagréable d’enfermement pourrait se dégager de votre image.
On peut distinguer 3 formes qui offrent un sens de lecture dans une image : le triangle, le rectangle et l’ovale. Une part de tarte est un triangle. Un plateau ou un cake sont rectangulaires. L’ovale peut se retrouver dans la forme d’une assiette ou d’un pain. Notre œil va suivre machinalement la pointe du triangle et la forme longiligne du rectangle et de l’ovale.
Vous devez toujours être attentif à la direction que prennent vos plats au sein de votre scène. Il est plus esthétique de faire rentrer la forme dans l’image et de l’orienter vers le spectateur en laissant de l’espace dans son sens.
Sur cette image ci-dessus, le plat rectangulaire traverse l’image. Une sensation d’étouffement se dégage de cette image. En plaçant le plateau plutôt dans la longueur face à l’objectif (cf ci-dessous), l’image semble plus harmonieuse et plus « respirante ».
Vous pouvez aussi placer votre plat ovale ou rectangulaire complètement face à vous, bien droit comme sur la version ci-dessous.
Exercices pratiques
- Photographiez selon les trois échelles de prises de vue : une vue globale, un cadrage serré et un gros plan. Changez votre placement d’avant en arrière pour obtenir une multitude d’échelles intermédiaires. Et si vous possédez plusieurs objectifs, testez-les !
- Lors de la prise de vue d’un plat, testez les deux orientations possibles, verticales et horizontales. Vous serez à même de juger ce que vous préférez. Parfois, il vaut mieux privilégier un format plutôt qu’un autre. Exploitez leurs caractéristiques.
- Mettez en pratique le cadrage en coin. Explorez la position de votre sujet. Laissez-le entier ou coupez-le franchement verticalement et/ou horizontalement, sur un bord, deux bords ou plus.
- Lorsque vous vous sentirez un peu plus à l’aise, mettez en pratique les conseils sur la direction du sujet : soyez attentifs à l’orientation de vos plats selon leur forme et leur position dans l’image.